Les portes des salles de spectacle sont closes. Mais les artistes sont toujours là, qui composent, enregistrent… Et leur place est sur scène ! Tranzistor repart en live, pour une nouvelle émission enregistrée sans public, en partenariat avec Le Carré, scène nationale à Château-Gontier-sur-Mayenne.
Comme un symbole, un projecteur éclaire le plateau vide du Théâtre des Ursulines. Puis, guitare rouge en bandoulière, Alice HA entre dans la lumière. Bien qu’elle avoue n’avoir jamais joué sur une aussi grande scène, la jeune musicienne ne semble guère impressionnée. Elle est là, à l’aise et naturelle, directement connectée aux émotions qui ont fait naître ses chansons folk, bientôt collectées dans un premier album en cours d’enregistrement. Un chant chaleureux, clair et puissant, quelques arpèges de guitare cristalline… Ici, simplicité rime avec sincérité. Alice HA est ce qu’elle chante et chante ce qu’elle est. Dans ses chansons « écrites très vites », comme pour se libérer d’un trop-plein, elle se livre, généreuse et sans fard. Avec parfois, vibrant dans la voix, des accents de l’enfant qu’elle était il n’y a encore pas si longtemps. Rien de neuf sous les projos sans doute. Mais quand les poils des avant-bras se dressent, peu importe le reste… Trahissant ses origines punks, la chanteuse conclut avec une relecture en apesanteur de l’inoxydable « Guns of Brixton » des Clash. Frissons garantis.
Son 8e album, Degiheugi nous fait le plaisir de le jouer live pour la première fois dans Tranzistor l’émission. « Homme de studio avant tout », il a longtemps préféré « s’enfermer dans sa grotte pour composer » que de se confronter au public. Mais depuis le beatmaker a pris goût à la scène et à trouvé la formule qui lui permet de « vraiment » interpréter sa musique en live, « plutôt que de se contenter d’appuyer sur play ». Impossible pour lui de prendre du plaisir et d’en donner au public sans cette prise de risque et ces montées d’adrénaline qui font qu’un concert est « vivant ». Fin scratcheur et virtuose des pads, il déroule un set calé au millimètre, associant nouveaux titres et classiques, dont certains cumulent plusieurs dizaines de millions d’écoute sur les plateformes de streaming. Fan inconditionnel du groove des seventies, ce digger invétéré ausculte les tréfonds des archives musicales du web pour en extraire des samples, qu’il assemble dans ses fresques hip-hop instrumentales au fort pouvoir onirique. Sur nos dancefloors domestiques, on balance donc entre rêveries extatiques et déhanchements endiablés.
Instrumentale, la musique de Super Shiva partage avec celle de Degiheugi un caractère puissamment cinématographique. Les compositions rétro-futuristes des quatre lavallois (« dont trois humains ») sont comme autant de BO de films de science-fiction imaginaires, entre climats un rien flippants et nanards de série B hilarants. Transparaissant dans les titres des morceaux (« Les envahisseurs de Montourtiers », « Dinosaure du futur »…), ce recours récurrent au second degré vient contrebalancer la dimension parfois un peu abstraite des explorations du quatuor, multipliant les changements de tempo et de caps, les expérimentations sonores, les formats non-standards… Malgré l’absence, depuis près d’un an, de concerts et de répétitions (faute de studios ouverts), l’aéronef Super Shiva tient parfaitement sa trajectoire : bien huilée, la mécanique est rôdée. Mélodies intersidérantes, guitares cosmiques, rythmiques robotiques, antiques claviers analogiques gorgés d’effets psychotropes… C’est dense et foisonnant, un peu comme si, parti en expédition sur une autre planète, on traversait une jungle luxuriante, une nuit d’orage mécanique.
Une émission proposée par Mayenne Culture, en partenariat avec Le Carré, scène nationale, L’Autre radio et L’Œil mécanique.
Chaque premier jeudi du mois à 21h sur L’autre radio, Tranzistor l’émission accueille un acteur de la culture en Mayenne : artiste, programmateur, organisateur de spectacle… Trois fois par an, Tranzistor part en « live » pour une émission en public.
Au programme : interviews et concerts avec deux ou trois artistes en pleine actualité.
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