Paul Faure part de bribes… quelques notes, pas plus. Celles d’une mélodie lancée par un oiseau, ou d’une symphonie dont on a oublié le nom du compositeur. De ces musiques entêtantes, qu’on porte des journées entières sans savoir comment elles nous sont venues. Ces quelques notes, le pianiste les a portées en lui un certain temps sans doute. Le temps d’en chercher les couleurs possibles, d’en explorer les harmonies cachées, de les détourner pour peu à peu les faire siennes. Certes, sont déjà passés par là Olivier Messiaen et ses transcriptions de chant d’oiseaux, Uri Caine et ses Walkyries ou Herbie Hancock dans une des plus belles versions du Concerto en sol de Ravel. Mais dans ce disque, ces mélodies premières ne sont qu’une évocation, comme l’écho d’un inconscient musical collectif. On peut l’écouter comme une relecture des sons qui nous entourent ; on peut aussi chercher à mieux saisir comment la musique apparaît au musicien, comment il se l’approprie, comment il l’a transforme, pour ensuite la donner à l’auditeur qui a son tour la fera sienne : « l’Ode à la joie » retrouve une ligne fluette de mélodie populaire, les harmonies jazz se colorent de Debussy ou se heurtent à Bach, et… une grenouille chante (vraiment !) le blues.
Ce 5e album, né de chants d’oiseaux, de grenouilles surnaturelles, de mélodies qui appartiennent aujourd’hui à tous, se révèle finalement être le témoignage intime, sincère et touchant d’un musicien nous livrant la musique qui l’anime lorsqu’il écoute le monde.
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